• Hôpital de la Croix-Rousse : ouverture sous tensions

    Article paru le 26.08.2010 dans le Progrès, édition du Rhône

    Psychodrame autour de la fusion des services

    de greffes de foie

    L'ouverture du bâtiment médico-chirurgical marque aussi la fusion des deux services de transplantations hépatiques des HCL, à l'hôpital Edouard-Herriot et à la Croix-Rousse. Un dossier explosif sans cesse repoussé depuis 20 ans. « Si cela avait été discuté il y a quelques années, le site d'HEH aurait sans doute été retenu », reconnaît le Pr Christian Ducerf. Une soixantaine de greffes y sont réalisées chaque année contre une quarantaine à la Croix-Rousse. Mais HEH a vieilli sans espoir de rénovation à court terme tandis que l'hôpital Femme-Mère-Enfant et le BMC sont sortis de terre. La direction des HCL a donc décidé de regrouper, à la Croix-Rousse, les activités de greffes de foie en un seul service. Avec un seul chef. Le poste a été proposé au Pr Christian Ducerf (Croix-Rousse) et non au Pr Olivier Boillot (HEH). Spécialiste des greffes pédiatriques, ce dernier est un expert mondialement reconnu, auteur de la première greffe d'une partie du foie issue d'un donneur vivant, en 1992. Mais l'administration lui reproche de n'avoir jamais travaillé en équipe et de n'avoir formé personne, une mission essentielle dans un CHU. De son côté, le Pr Boillot a aussi accumulé les rancœurs, dénonçant « 20 ans de difficultés et de conditions médiocres ». Il n'estime « pas acceptable » la proposition de la direction : « Je ne serais pas dans une position qui me permettra de développer un projet médical ambitieux. » Que se passera-t-il s'il ne rejoint pas le service unifié au 15 septembre ? Les 2 listes de patients en attente de greffes seront fusionnées en une seule. « Pour les adultes, il n'y aura rien de changé », précise le Pr Ducerf. Mais pour les greffes pédiatriques, « il nous faudra un temps de latence pour être de nouveau opérationnels », reconnaît le chirurgien. Un chirurgien pédiatrique a déjà réalisé des greffes de foie avec le Pr Boillot, un autre est en cours de formation et un spécialiste de l'hôpital Necker leur viendra en aide. « Quelques enfants devront sans doute être envoyés à Paris, mais nous espérons être opérationnels d'ici 6 mois à un an. On a les moyens de le faire », assure le Pr Ducerf. Quels que soient les torts des uns ou des autres, cette affaire donne un sentiment de gâchis pour les patients. Des anciens greffés ont ainsi décidé de se mobiliser et de fonder un collectif de soutien. Mère d'un enfant greffé en juin, Benoîte Curt a lancé un blog avec une pétition de soutien, tandis que Gérard Tardy, maire de Lorette (Loire), greffé en 1999, a remis un dossier à Nicolas Sarkozy. Dénonçant « la lamentable situation de destruction d'un des plus performant centre de transplantations hépatiques de France », le collectif s'inquiète du devenir des greffes pédiatriques et des greffes à partir de donneurs vivants. S'il a été formé à cette technique, le Pr Ducerf avait choisi de ne pas la pratiquer mais précise que le service « se donnera les moyens d'en faire ».

    S.M